Monsieur le ministre de l’Agriculture,

Vendredi 24 septembre lors de votre déplacement en Aveyron, je vous ai interpellé sur le Nutri-score, au cours de la table ronde en préfecture.

Je vous ai exprimé que dans notre AOP Roquefort, le seul « conservateur » qui pouvait être utilisé dans la recette, est du sel de mer, on ne plus naturel. Pour notre fromage au lait cru, c’est aussi le seul élément qui nous permet d’assurer une sécurité sanitaire. Je vous ai également exprimé que tant que le sel était rédhibitoire dans l’algorithme du Nutri-score, nous étions condamnés dans l’acte d’achat que pouvait avoir le consommateur non averti. Je viens par le présent message insister un peu plus auprès de vous et ajouter un autre élément qui m’est apparu.

Le sel est une saveur fondamentale qui sert à la fois d’exhausteur de goût et également d’épurateur bactérien encore plus fondamental dans un fromage au vrai lait cru. Nous sommes d’accord qu’une consommation excessive de sel est reconnue comme ayant un aspect délétère sur le système cardiovasculaire. En revanche, sur les aliments où le cahier des charges est modifiable à la seule discrétion d’un industriel, les caractéristiques propres du sel de mer peuvent être substituées aisément et du coup ne plus rentrer dans les critères de l’algorithme du Nutri-score.

Dans les faits, les industriels de la viande ont déjà substitué le sel NaCl par des sels de magnésium. Les sels de magnésium ne bénéficient pas pour le moment d’études suffisantes pour prouver leurs innocuité. Substituer l’un par l’autre c’est s’affranchir d’une mauvaise note mais c’est surtout jouer au petit sorcier au regard du risque pour la santé de nos concitoyens. Le remède Nutri-score peut donc sur ce point être pire que le mal.

J’ai très bien compris votre envie de modifier l’aspect quantitatif de la ration prise en compte et c’est peut être déjà une avancée. Cependant, je reste sur le fait qu’il faudrait arriver à exempter les produits AOP, AOC et IGP sain, de tradition et de terroir, d’une obligation du Nutri-score. Cette mise en concurrence entre produits industriels et produits sous label est déloyale. Les produits ultratransformés sont pointés du doigt comme étant très problématiques pour la santé et pourtant, ce sont eux qui peuvent sortir avec une bonne note Nutri-score.

A mes yeux c’est schizophrène.

Les derniers sondages montrent que les consommateurs s’orientent vers l’achat des produits A, B et C et délaissent les D et E. Et à ce jour, les dernières propositions sur les modifications de l’algorithme font que le Roquefort et les bleus en général restent condamnés à la note E. Dès lors, est ce que le Roquefort pourra supporter d’être l’emblème de la gastronomie Française à l’international et non consommé sur son marché naturel ?

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de ma haute considération.

Alexandre Vialettes,

Saint Jean le 29 septembre 2021